Lettre du 10 mars 1917 de Marcel Sibaud

Valréas, le 10 mars 1917

 

Ma petite chérie,
Les jours se suivent et heureusement parfois ne se ressemblent pas toujours. Aujourd’hui a été une bonne journée. Lever du soleil dans un ciel absolument pur ; température douce et dire qu’hier matin il gelait à pierre fendre ! La journée commençait par une conférence de fusil mitrailleur que j’armais bien. Puis dessin panoramique, cela n’a pas mal marché et le sergent instructeur a encore trouvé qu’il n’y avait guère que le mien de présentable. Enfin après le déjeuner manœuvre et j’étais chef de section. Enfin cela s’est bien passé ; je n’ai été l’objet d’aucune critique et même j’ai reçu un petit compliment. Le temps était radieux ; l’amphithéâtre de montagne apparaissait avec une netteté magnifique. Au centre de la plaine, Valréas domine par se vieille église et sa tour carrée que tu as dû voir en carte postale. Au loin se détache sur son promontoire le château de Grignan. La section franchissait des ravins ombreux aux bords desquels de vieux chênes ou des oliviers tourmentés se détachaient à contre-jour. Que de jolies photos on ferait là en d’autres jours. Par exemple je suis rentrée avec une soif énorme. Je n’ai guère toussé et je crois que si ce temps là durait cela ne tarderait pas à aller tout à fait bien quoiqu’un peu courbaturé par le lancement de grenades ; j’avais retrouvé mes jambes pour diriger ma section. Que serait-ce avec l’odeur de poudre. Décidemment c’est bien vers une guerre de mouvement qu’on nous aiguille. On nous l’a encore répété aujourd’hui et j’espère bien que cette fois nous pourrons renvoyer le boche l’épée dans les reins jusque chez lui. Je crois que l’offensive générale ne va pas tarder.
Je n’ai pas eu le plaisir de te lire ce matin. Je n’avais que 2 lettres du chef et de Lambel ; lettres de félicitations vraiment gentilles. Mais comme je l’espérais j’ai trouvé ta petite lettre au retour de la manœuvre avec une de M. Gallo.
Ton oncle trouve parfaite la naissance de Marcelle, le 3e à son avis devrait être un garçon ! Ton oncle a écrit au capitaine ; celui-ci ne m’a rien dit. Au mois de mai ton oncle compte fêter mes galons. René a une forte rougeole ce qui a empêché la famille de venir te voir.
Je pense comme toi qu’Yves est un beau petit gaillard ; cela fera un bon artilleur et je le vois déjà crânement campé sur un grand cheval. Dire que soeurette a déjà près de 15 jours ! Comme cela passe et pourtant comme c’est long.
Alors du côté de Laurence, c’est toujours vague ? J’ai écrit 2 fois à Georges mais n’ai pas encore eu de réponse.
Je suis bien content de ce que tu me dis pour maman et que son traitement ait réussi.
Je t’écrirai demain où j’espère ne pas être trop chargé. Ce soir je vais me coucher de bonne heure ayant une certaine gêne que tu devines.
Je t’embrasse bien tendrement ainsi que les petits.
Ton Marcel

Amitiés aux mamans.


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