Lettre du 10 mars 1917 d’Emilie Sibaud

Vincennes, le 10 mars 1917
Samedi soir

 

Mon chéri,
J’ai été très heureuse de te lire aujourd’hui, surtout heureuse de te sentir moins triste. Dans ma première lettre je te donnais tous les détails. Je ne me souviens plus si je te les rappelle dans une autre lettre, donc j’ai commencé à avoir quelques petites douleurs à 3h ½, à 8h ½ on est allé chercher la doctoresse (je l’avais déjà vu le matin). A 10h ½ du soir notre toute petite était là ! Je ne croyais pas que ce serait si vite fini. Je te disais aussi dans ma lettre que la doctoresse m’avait trouvée très courageuse et qu’Yves avait dormi tout le temps ; que les Huet avaient été très complaisants. Madame Huet ne nous a pas quittés, c’est elle qui a reçu la petite, aussi elle en raffole ! Si tu pouvais leur écrire un petit mot, cela leur ferait plaisir, et si tu pouvais (quand tu auras le temps) envoyer une petite boîte de berlingots à Roger par exemple, cela n’aurait pas l’air d’un cadeau maos d’une gentillesse, ne lui mets pas de nougats, il ne les aime pas.
Que je te parle encore de nos mignons, toujours aussi sage sœurette ! Elle ouvre encore plus grand ses beaux yeux sur tout ce qui l’entoure, elle est vraiment gentille pour le moment ! Yves grandit et grossit toujours ! Toujours aussi gentil avec sœurette, il a des mots à lui pour lui parler et il embrasse si gracieusement si délicatement ses menottes ! Qu’ils sont jolis tous les deux.
Ma santé est bonne, tout a été très bien, la doctoresse a été très gentille, elle vient encore tous les jours ; cela a été plutôt mieux que pour Yves.
Oui en effet le capitaine a l’air un peu bizarre ! Si seulement tu pouvais venir à Pâques ! Ce serait pour moi une grande joie ! Et si surtout tu pouvais dire vrai, si l’offensive pouvait réussir ; que ce soit la fin du cauchemar que nous vivons !
Mais je suis moins triste, ta lettre, elle-même, l’était moins. Ce qui m’ennuie, c’est de te savoir souffrant, oui il vaut mieux consulter.
J’ai parlé à la doctoresse de mes malaises, elle m’a dit que c’était nerveux et dû aux émotions ; que c’était assez difficile d’y remédier mais qu’elle pense qu’en nourrissant cela se dissiperait.
Je crains bien que René soit plus souffrant ! Ils devaient venir, je vais leur écrire demain. J’ai écrit aux Bellet dimanche dernier.
T’ai-je dit que j’avais reçu une gentille lettre de Marie ?
Nous t’envoyons un colis, maman t’a mis le petit pot de confiture, un pavé de pain d’épices, du sucre des bonbons (qu’Yves t’envoie), du pâté et de l’eau de Cologne. Nous espérons qu’il t’arrivera en bon état.
Nous avons eu aujourd’hui la visite de B. M., le pauvre garçon avait apporté à Yves des chocolats et des oranges. Il a bien regretté de ne pas te voir.
Allons, je te quitte mon chéri en t’embrassant mille et mille fois.
Les petits t’envoient leurs plus grandes, leurs meilleures caresses, Yves de gros baisers et sœurette la caresse de ses petites mains. Encore de bons baisers.
Tout à toi.
Emilie

Maman t’envoie ses meilleures amitiés.


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