Lettre du 11 avril 1917 d’Emilie Sibaud

Vincennes, le 11 avril 1917
Mercredi

 

Mon chéri,
J’ai reçu ce matin ta dépêche m’annonçant que tu avais fait un bon voyage.
Hier nous avons eu un temps abominable, j’étais allée faire quelques courses avec Yves en allant porter ta lettre et nous avons été pris par une tempête de neige. Bien que nous ayons couru pour revenir, je crois que j’ai eu un peu froid, est-ce cela ? La nuit dernière, j’ai été malade, un véritable dérangement dans le genre de celui de bébé la semaine dernière, avec les mêmes caractères qui nous avaient inquiétés à tort je crois, car le voici tout à fait remis. Et moi-même ce matin je vais mieux mais ce sera sans doute cause que ma lettre, ne partant qu’à 2 h au lieu de midi, t’arrivera avec un léger retard. Je vais aller la porter car maman est toujours souffrante et m’inquiète bien. Sœurette se porte comme un charme, il n’est plus question de son rhume ! Rhume qui n’a peut-être d’ailleurs pas existé !
Je vais écrire un mot à Suzanne. Je pense aller y déjeuner la semaine prochaine pour leur donner de tes nouvelles maintenant que j’ai eu le plaisir de te voir, plaisir trop court hélas ! Ton départ a causé un grand vide, tous les habitants de notre cher chez nous s’étaient vite réhabitués à ta présence, et la maison semble encore une fois bien vide. Petit Yves parle de toi à chaque instant et je vois bien que les grands yeux de notre mignonne te cherchent ! Je ne parle pas de moi !! Tu vas reprendre ton dur métier, ah ! Si je pouvais alléger ton travail comme je donnerais bien toutes mes forces pour t’en conserver un peu des tiennes !
Tu as oublié ta petite brosse, parlons plus prosaïque ! Je compte te la mettre dans le colis que nous allons t’envoyer avec le bracelet montre. Nous avons aussi en vue la préparation d’un gâteau quatre-quarts, qui ne te sera pas désagréable, je crois ! As-tu besoin d’argent ? Tu n’as pas emporté assez ; j’ai toujours peur que tu en manques.
Allons au revoir mon chéri, je te quitte pour aujourd’hui en attendant le plaisir d’avoir de tes nouvelles plus longuement. Je t’embrasse mille et mille fois.
Tout à toi.
Emilie

Les bonnes caresses de petite sœurette et gros baisers de ton grand garçon !


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