Lettre du 26 mars 1917 de Marcel Sibaud

Valréas, le 26 mars 1917

 

Ma petite chérie,
Ce pays est vraiment drôle : ce matin temps couvert pas de vent, frais mais supportable ; pour la journée le soleil a percé, journée plutôt chaude ; ce soir temps de nouveau couvert, frais mais sans vent. Que n’est-ce toujours ainsi.
J’espère que la fatigue que tu ressentais vendredi soir n’a pas eu de suite fâcheux. Ne te fatigue pas trop. Plus qu’une maison bien en ordre je tiens à trouver  une petite maman parfaitement rétablie.
Tu me fais grand plaisir à me raconter les petites histoires de toto. Pauvre petit qui souhaite avoir un binocle. Qu’il ne pousse pas si loin l’imitation, c’est trop embêtant.
Tu me dis qu’il comprend ; cela me rappelle une chose que je voulais te signaler et à laquelle tu as certainement pensé : il est inutile qu’il soit présent quand tu arranges la petite.
Bernados est très sensiblement de mon âge ; il est marié sans enfants ; c’est un mariage un peu comme le notre : il a connu sa femme très jeune. Est-ce qu’elle l’est restée ? Est-ce qu’il est autoritaire ? Mais il semble la tenir en tutelle très étroite. Il a été 2 ans en Amérique du Sud, s’étant fait mettre en disponibilité. Il est mobilisé depuis le début et est assez fatigué. Il ne travaille pas beaucoup ayant coutume de se coucher de bonne heure et de se lever tard. Il vient de savoir aujourd’hui ses notes qui sont bonnes, ce qui ne m’étonne pas car il est très intelligent. Les voici : calme et froid, énergique, esprit clair. Peut faire un officier. Ce sont d’excellentes notes pour un futur officier.
Je suis aussi très bien avec un nommé Frère, 1er prix de conservatoire pour la diction, je coirs ; il n’est pas très fort mais c’est un charmant garçon.
Les confitures que tu m’annonces me font bien plaisir ; comme quand j’étais au lycée, c’est encore ce que je préfère entre 2 morceaux de pain. Le pâté est parfait pour le matin. Quand au savon mon 1er morceau est encore presque intact, c’est te dire que je n’en manque pas. Ne te tourmente pas pour le pain d’épices ; si j’en voulais, j’en trouverais ici mais tu me connais bien en pensant que ton envoi nécessite d’aller chercher des provisions.
Je vais peut-être avoir à faire une dépense assez forte ; il me faudrait une boussole ; on peut en avoir pour 6fr 50 mais pour en avoir une bien ce serait une carrée de 21,50 ; boussole Peigné qu’on vent chez Berger Levrault. Je me demande si  je dois faire une pareille dépense ; peut-être maman aurait-elle une réduction comme institutrice. Tu pourrais peut-être lui en parler pour le cas où elle irait à Paris.
Si mes souvenirs pour Toto son exacts, le poids de Marcelle me paraît magnifique : à 3 semaines Yves ne pesait je crois que 3kgs 750 et passait pour un bel enfant, 600 gr de plus c’est merveilleux et je suis heureux de complimenter la petite maman.
Je te quitte ayant un devoir à mettre au net. Un autre va nous tomber jeudi ; le bourrage reprend.

Mille baisers de ton Marcel.
Baisers aux petits.
Amitiés aux mamans.


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