Lettre du 1er avril 1917 d’Emilie Sibaud

Vincennes, le 1er avril 1917
Dimanche matin

 

Mon chéri,
Dans huit jours, j’espère que tu seras près de nous. Moi aussi je ne vis que dans l’espoir de te voir à Pâques. Je dis : je mettrai ceci ou cela à sœurette quand Marcel viendra, je ferai cela quand Marcel viendra.
J’ai dit à ta mère pour la boussole ; elle regardera jeudi en allant à Paris.
Quand au colis, je compte bien que tu auras tout liquidé pour venir à Pâques.
Je suis furieuse, imagines-tu quand finissant la grande toilette de Marcelle, j’ai oublié de la peser ! Ca sera pour demain, mais c’est trop bête.
J’espère que ton rhume te laisse tranquille et que tu n’en souffres pas trop. Hier j’ai été à la poste avec Yves, il y avait du vent mais il ne faisait pas froid. L’après-midi je suis encore sortie, mais sans notre toute petite, je craignais le vent pour elle. Peut-être aujourd’hui pourrai-je la sortir. Il ne fait pas encore beau temps ce matin. Je vais aller avec Yves à la poste porter ta lettre et vais voir le temps. Je n’ai pourtant pas perdu une minute depuis que je suis levée ; et bien il est déjà 10h ½ et j’ai encore Yves à baigner, à habiller et moi de même. Je ne sais comment font les personnes qui ont pour 2 heures à travailler dans une maison ! Ce n’est pas mon cas, et encore je ne fais jamais que la moitié de ce que je veux !
Je ne sais comment remercier Mme Huet de toutes ses complaisances. Enfin hier elle arrive avec un seau de charbon de 10K d’en face. Elle avait été en chercher pour elle et elle avait craint que j’ai manqué pour baigner les petits aujourd’hui. Maman et Mme Huet doivent aller lundi chez Bernot. Ils emmèneront le père Charles, le frère de Mme Toussaint qui rapportera les saces dans une voiture, ils parviendront aussi à rapporter 4 sacs, puisque pour la queue ils seront 4. Moi je garderai Roger avec Yves, ce n’est pas le moindre travail, car il est terrible. Hier j’avais été la remercier et la payer du charbon ; par exception j’avais emmené Yves, je lui avais tellement dit d’être sage qu’il n’a pas bougé de son petit fauteuil, mais Roger a failli l’étrangler. Je n’ai eu que le temps de l’arracher de ses bras, il avait l’oreille toute rouge. Madame Huet était désolée, j’avais beau lui dire que ce n’était pas de sa faute et le plus drôle, c’est qu’Yves n’a rien dit, même pas pleuré !
Lui-même est d’ailleurs beaucoup plus « garçon » que quand tu l’as quitté ! Il te grimpe n’importe où en cinq minutes, quand il se cogne il dit « j’ai fait comme Guignol, je me suis cogné la tête oh ! Papa Guignol ! ». Il a dû entendre ça à Saint-Mandé !
Je vais te quitter pour aller mettre ta lettre à la poste. Au revoir mon aimé, à bientôt peut-être le plaisir de te voir ! Reçois mes meilleurs et bien tendres baisers.
Tout à toi.
Emilie

Douces caresses de notre petite Tranquille et gros baisers de notre Tourbillon !


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