Valréas, 13 mars 1917
Ma petite chérie,
D’ordinaire le 13 me réussit. Mais il n’en a pas été ainsi aujourd’hui. Pas de lettre de toi au courrier du matin pas davantage au courrier du soir. J’espère qu’il s’agit encore d’un retard de train, que rien de fâcheux à la maison n’en est cause et que demain à 10 heures j’aurai deux lettres au lieu d’une.
A part cela la journée a été bonne. Beau temps avec du vent, mais du vent supportable. A un moment celui qui commandait ayant été pas trop mal, le capitaine m’a mis brusquement à sa place dans une situation délicate dont je me suis à peu près tiré. Hier soir je me suis couché à 9 heures juste. Mais ce soir j’ai un peu à faire car je ne veux pas me laisser mettre en retard. Malheureusement j’y serai forcément un peu le capitaine ne m’ayant pas encore rendu mon carnet qui est chez lui.
Je me plains d’un jour sans lettre mais les élèves qui sont de Nancy n’ont pas de nouvelles depuis plus de 15 jours. Est-ce parce que la ville a été bombardée. Ou se prépare-t-il quelque chose par là, je ne sais. En tous cas la prise de Bagdad, le recul boche sur l’A., notre succès de Champagne sont de bon augure.
Je continue d’aller bien mieux. Je ne tousse pour ainsi dire plus, dors mieux et suis moins las.
Les redoublants sont en période d’examens car il y en a pour eux. Je ne sais si on leur offrira un dîner d’adieu. Ils ont dit au début qu’on avait fait ainsi pour le cour d’avant. Ce sera une petite dépense imprévue. Sur le conseil d’oncle Emile, j’ai doublé la dose de vin blanc ou plutôt je tâche de faire 3 repas avec 1 litre au lieu de 4. Je considère que c’est comme un achat de médicament.
Je te quitte ma petite chérie en t’embrassant bien des fois ainsi que les 2 mignons.
Ton Marcel
Amitiés aux mamans.